Conscience, méditation et langage équestre
La conscience se trouve aux fondements de l'acte équestre. Mais quel regard portons-nous sur l'acte d'équitation, sur la relation au cheval ? Quelles perceptions ressentons-nous durant ce contact fabuleux avec les chevaux ? La plupart se contentent de ressentis ordinaires, d'un agrément simple alors que les chevaux nous proposent infiniment mieux. Mais on ne peut pas chercher ce que l'on ne connait pas car la conscience se modifie par la connaissance et par l'expérience uniquement. Nul ne peut comprendre la saveur du chocolat ou le délice de l'orgasme s'il ne l'a point goûté ou expérimenté. A défaut d'expérimentations, les mots et les explications se perdent en stérilité conceptuelle. L'équitation s'inscrit tel un chemin sensitif de modification de l'état de conscience, à condition d'ouvrir nos esprits et d'emprunter les bonnes voies. Ainsi, pour appréhender l'équitation de pleine conscience, il convient d'expérimenter des chemins non coercitifs, d'abandonner le principe d'exigence de soumission au profit de l'harmonie intelligente. Le cheval réagissant par résonance émotionnelle, le contrôle du mental et par delà des émotions représente le socle de toute la communication. Les matériels équestres provoquant de l'inconfort voire des douleurs activent l'instinct de fuite. Nous parlons bien des matériels à portée coercitive visant à obtenir la soumission du cheval, autrement dit de nombreux mors, les caveçons, les noseband, les muserolles serrées, tous les enrênements et les éperons. La perception des émotions négatives du cavalier produisent le même effet d'amplification de l'instinct de fuite chez le cheval. De fait, le contrôle de nos émotions s'avère tout aussi important que le tact lié à la finesse du langage des aides et que la douceur neutre des matériels utilisés. Par résonance émotionnelle, la perception d'émotions négatives produit chez le cheval le même inconfort, les mêmes anxiétés, voire une peur panique activant instantanément l'instinct de fuite. Nous découvrons ainsi que le premier but du cavalier consiste à construire et à maintenir un esprit de grégarité avec son cheval. Car la grégarité induit la confiance et le respect, autrement dit, le préalable à toute relation harmonieuse et à l'ouverture d'un chemin cognitif. Cet état de conscience unifié s'obtient par le contrôle du mental du cavalier. Chaque pensée, chaque parole et chaque acte produit une émotion toujours plus ou moins positive ou négative, mais jamais neutre. Les émotions représentent donc le carburant des actions et donc de la créativité. Cet alignement des consciences nécessite un contrôle des fréquences cérébrales du cavalier afin de pouvoir rejoindre le niveau de conscience du cheval. De manière claire, par la spéculation mentale permanente, les humains évoluent en fréquences Beta alors que les chevaux vivent dans la quiétude mentale des ondes Alpha, celles que nous découvrons lorsque nous méditons. Pour donner une image du niveau de "pollution cérébrale" produit par les humains, nous générons quotidiennement jusqu'à 70000 pensées différentes. Pour les chevaux, par notre ignorance, nous représentons pour la plupart d'entre nous, une source de stress et de pollution émotionnelle. Pour vous donner une idée, imaginez une discussion avec une personne stressée, névrosée, arbitraire et qui de surcroit vous parle en accompagnant ses propos par des touches tactiles imprécises et désagréables, inopportunes et souvent douloureuses par leur intensité. Voilà ce que perçoivent les chevaux, entre la pollution émotionnelle désordonnée des cavaliers et les gestes arbitraires amplifiés par des matériels douloureux. Alors que les cavaliers éveillés font jaillir de leurs entrailles une fontaine bienveillante d'empathie, de quiétude et d'ondes référentes qui se traduisent par un langage gestuel non verbal intelligent dénué de coercition. Tout le monde n'est pas adepte de la méditation quand bien même, elle devrait être enseignée à l'école avant seulement d'appréhender les matières cognitives. L'apprentissage de la méditation dite "passive" va permettre de découvrir ces sensations magiques de conscience liées aux fréquences Alpha et à l'entrée en vacuité. Pour cela, il faudrait consacrer chaque jour un moment à la découverte de ces disciplines de contrôle de l'esprit. Au-delà du langage équestre, elles produisent des effets bénéfiques à tous les niveaux de la vie temporelle. Mais attention, car pour la pratique équestre, nous devons pouvoir accéder à ces états de conscience dans l'action. Nous parlons alors de "méditations actives". Car l'équitation induit un état de conscience active dans le mouvement et dans l'action, aligné entre l'homme et le cheval. S'il est facile de méditer dans le calme et dans le silence du geste, il est autrement plus difficile d'accéder à ces états de conscience dans l'action concrétisée par des gestes de langage, face à des réactions instinctives parfois subites du cheval, face à des dysfonctionnements comportementaux ou face aux réactions liées à la fuite. Il existe des exercices particuliers issus des voies alchimiques ancestrales qui permettent à tout un chacun de découvrir ces clés. Elles se nomment "Présence". Mais rien à voir avec les exercices "New Age" à la mode. L'alignement des consciences de l'homme et du cheval ne représente que la première étape, puisque par un langage adapté, par une gestuelle spécifique, nous devons maintenir cet état de Présence autant chez le cavalier que chez le cheval. Lorsque les consciences sont alignées en fréquences et que l'attention de l'instant est permanente, nous avons créé le préalable qui permet d'ouvrir une voie cognitive chez le cheval, sans coercition et avec un engagement volontaire. Nous contrôlons alors l'esprit et l'instinct de l'animal. En alchimie on définit l'état de Présence par l'illustration de "l'observateur observé". Adapté à la relation équestre, le cavalier et le cheval doivent être en état de vigilance réciproque mutuelle permanente. Chacun doit rester connecté à l'autre en permanence, tant en attention, en vigilance et en conscience. Voilà LE SECRET. Nous contrôlons alors l'instinct de fuite du cheval par la grégarité et sa Présence empathique annihile alors nos propres peurs primordiales. Ainsi devenons-nous le "référent", celui qui inspire la confiance absolue dans toutes les actions relationnelles car les peurs, de part et d'autre, se dissolvent dans cette alchimie. On apprend infiniment mieux dans le bien-être et dans la quiétude du sentiment d'amour. A ces conditions uniquement, nous pouvons alors construire un langage équestre cognitif binaire. Mais celui-ci doit préalablement être connu du cavalier avant même que de l'expérimenter avec le cheval. Telle une langue étrangère, ce langage s'apprend, mais ne s'improvise pas. On peut apprendre une langue au contact des peuples, bien sûr. Mais une philosophie, un vocabulaire et une grammaire maîtrisés au préalable, permettent de gagner énormément de temps et surtout d'éviter de nombreuses erreurs d'incompréhension. En équitation, celles-ci se trouvent à l'origine de la plupart des dysfonctionnements comportementaux. Ce langage conscient et intelligent est immédiatement reconnu par tous les chevaux. Le paradigme de la soumission disparait alors pour laisser place à une harmonie cognitive extraordinaire. François Baucher ou Nuno Oliveira par exemple, illustrent parfaitement cet art global. En réalité, la partie technique et mécaniste ne représente que 20% du résultat. L'essentiel ne se voit pas car il se situe dans les champs de conscience. S'ensuit alors un chemin de perfectionnement équestre qui ouvre les voies de la Haute-Ecole par le développement d'un langage équestre d'une finesse égale à la sensibilité des chevaux. Rappelons pour illustration, qu'un cheval perçoit une mouche qui se pose sur sa croupe. Tous les principes de l'équitation de légèreté prennent alors un sens nouveau par la subtilité des gestes et par l'intelligence du langage. Bien entendu, le cavalier devra continuer à travailler son assiette afin d'acquérir l'aisance en selle lui permettant de contrôler à la fois son équilibre et sa propre coordination motrice. L'équitation doit se pratiquer avec la force, l'innocence et l'esprit d'une fillette de 7 ans. Ces enseignements représentent le fruit de plusieurs décennies de travail, de recherche et d'expérimentation individuelle et collective en équitation de Haute-Ecole bien sûr, mais surtout en études de l'alchimie des voies externes et internes, des sciences du langage inter et intra espèces, des neurosciences et de l'éthologie, l'ensemble de ces disciplines formant la zoosémiotique équestre. L'équitation se trouve désormais à une étape charnière d'évolution. Soit elle poursuivra le paradigme de la soumission et elle finira par disparaître sous la pression justifiée des associations de protection animale. Car on ne peut prétendre aimer et faire souffrir sciemment l'objet de son amour. Voilà une dichotomie impossible. L'équitation doit devenir consciente et intelligente pour ouvrir de nouvelles voies d'harmonie et d'intelligence dont les effets dépassent de très loin le cadre équestre, puisque la plus noble conquête de l'homme devient alors un Maître-Guide qui ouvre une nouvelle voie d'éveil et de plénitude quotidienne. Le cheval a servi de métaphore pour le Tao par exemple ou pour illustrer le contrôle du mental dans divers ouvrages d'enseignements hermétiques. Désormais, le cheval devient l'enseignant, le révélateur, le guide opératif. Amis cavaliers, réfléchissez quand vous caressez avec amour et passion votre compagnon équin. Réalisez son niveau de sensibilité et prenez conscience de la réalité de la nature de son esprit et de son intelligence! Il incarne la promesse de plaisirs décuplés et d'harmonie relationnelle et cognitive dont vous n'avez pas idée. Par ignorance, la plupart des cavaliers n'en dégustent qu'un infime échantillon alors que la plus noble conquête de l'homme nous propose une profusion de délices. Comprenne qui pourra.
Francis Stuck
Illustration : www.liskallorca.fr
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